L’Institut catholique missionnaire d’Abidjan (Icma) organise du 5 au 6 avril 2019, son VIIè Colloque international à Abobo, portant sur la problématique de « La foi chrétienne face à la sorcellerie ».
En Afrique, la sorcellerie est l’une des manifestations connues du mal et de l’occultisme dont les effets sont dévastateurs pour les individus et les communautés sociales. La plupart des sociétés africaines font l’expérience de cette réalité. (…) Par ailleurs, la peur, la panique et des croyances superstitieuses peuvent amener à attribuer à la sorcellerie des échecs et des difficultés de la vie personnelle ou communautés.
Tel est l’enjeu du VIIè Colloque international organisé par l’Institut catholique missionnaire d’Abidjan (Icma), sis à Abobo, abordant le thème : « La foi chrétienne face à la sorcellerie ».
Mgr Siméon Ahouana Djro, Archevêque métropolitain de Bouaké (centre), a ouvert les travaux de ce colloque, en soulignant que la sorcellerie est un fait social qui ne peut se comprendre dans la sociologie classique.
« La sorcellerie pose un questionnement à l’Eglise. Dans nos communautés, il y a des gens qui sont vraiment encrés dans la sorcellerie, et pourtant, ce sont des personnes qui sont à l’église matins, midis et soirs et communient », a soutenu l’évêque de Bouaké. Expliquant que la sorcellerie est liée à un problème de santé, de pauvreté, etc.
« Pour nous, la sorcellerie en Afrique est un phénomène et une réalité complexe. Au cours de colloque, j’ai invité les intervenants à cerner ce problème à travers une démarche interdisciplinaire », a-t-il invité.
La sorcellerie, facteur de sous-développement
Professeur Fabian Gbortsu, prêtre de la Société des missions africaines (Sma) et spécialiste de Théologie de la morale africaine, a fait une communication portant sur le thème : « La sorcellerie : pratique des religions traditionnelles africaines et conséquences pour la vie des personnes et des sociétés ». « On pense que tout se vit au niveau spirituel tandis que nous sommes des êtres physiques. Au lieu de vivre dans le monde actuel, nous vivons plutôt dans le monde spirituel si bien que nous lions tout avec les esprits, les sorciers, etc explique-t-il. Du coup, nous ne sommes pas capables de se dépasser pour réaliser les potentiels en nous. »
Des conceptions souvent négatives conçues par l’homme africain, avec un pan de la foi non authentique l’amène avoir une autre approche qui met en péril quelquefois sa vie et le développement de son pays.
« On a peur que l’autre me fasse du mal, qu’il « mange » mon âme alors que cette conception n’est qu’au niveau spirituel. Je dirai que 90% de nos fidèles vivent dans le monde spirituel. C’est ce qui m’amène à dire que c’est l’un des facteurs du sous-développement en Afrique », a justifié l’abbé Gbortsu.
Sorcellerie un fait réel
« La sorcellerie est un factum. Il n’est pas facile de supprimer le factum par des discours. C’est un fait. La sorcellerie existe depuis des temps immémoriaux. Elle reste encore aujourd’hui d’actualité », a insisté le dogmaticien et philosophe Boniface Kouassi, lors de sa communication. Pour lui, la sorcellerie est douée d’une existence réelle. Précisant en outre « il ne s’agit pas de ne pas croire ou de croire. C’est un fait. Tous les peuples y croient selon l’expression du professeur Boa Tiemélé Ramsès. Le réel en Afrique n’est pas seulement ce qu’on voit, ce qu’on entend, ce qu’on touche. Ce dont on sent les effets ».
L’Afrique étant au cœur de ce phénomène depuis des millénaires et qui fait débat, avec ces effets destructeurs et de désolations dans les familles et sociétés. A ses yeux, nier la sorcellerie, c’est négliger les puissances voire la réalité du mal de certains individus, qui dans la société peuvent se servir des forces occultes pour nuire à autrui.
Ce Colloque international a réuni plusieurs experts, philosophes, anthropologues et théologiens venus de Côte d’Ivoire et d’Afrique.
Magloire Madjessou