L’Organisation nationale des journalistes d’investigation de Côte d’Ivoire (Onji-Ci) a produit, vendredi 15 mars 2024, une déclaration, dans laquelle elle s’insurge et dénonce cette loi, qui selon elle, met en danger les journalistes dans l’exercice de leur métier en Côte d’Ivoire.
L’Organisation nationale des journalistes d’investigation de Côte d’Ivoire (ONJI-CI) a pris connaissance avec une vive préoccupation de l’adoption par la Commission de la Recherche, de la Science, de la Technologie et de l’Environnement du nouveau projet de Loi relatif aux Communications électroniques, le jeudi 14 mars 2024, en attente du vote en plénière.
Ce projet de loi abroge l’ordonnance de 2012 sur les télécommunications et les Technologies de l’Information, à l’exception des articles 51, 71 et 157 relatifs à la création de l’Agence Ivoirienne de Gestion des Fréquences (AIGF) et de l’Autorité de Régulation des Télécommunications de Côte d’Ivoire (ARTCI).
Des informations en notre possession indiquent que lors des échanges portés devant les députés par M. Ibrahim Kalil Konaté, ministre de la Transition numérique et de la digitalisation du gouvernement, représentant du gouvernement, l’attention a notamment été attirée sur l’alinéa 3 de l’article 214 du projet de loi.
Cet alinéa dispose que quiconque intercepte, divulgue, publie ou utilise le contenu des messages électroniques, ou révèle leur existence, est passible de lourdes peines, sauf en cas de consentement exprès de l’auteur…
Cet alinéa dispose que quiconque intercepte, divulgue, publie ou utilise le contenu des messages électroniques, ou révèle leur existence, est passible de lourdes peines, sauf en cas de consentement exprès de l’auteur ou du destinataire de la communication, ou sur réquisition de l’autorité judiciaire dans le cadre d’une enquête judiciaire. La peine encourue est de 5 ans d’emprisonnement et de 10 millions de FCFA.
Nous avons pris note que certains députés, dont Antoine Assalé Tiémoko, se sont opposés à cet article, le considérant comme une atteinte supplémentaire à la liberté de la presse en raison de l’amende encourue. Ils ont demandé le retrait de cet alinéa ou ont proposé des amendements, qui ont été rejetés.
L’émissaire du gouvernement, le ministre Ibrahim Kalil Konaté, a justifié le maintien de l’alinéa en arguant qu’une loi protégeant les lanceurs d’alerte existe déjà, que cet alinéa ne restreint pas la liberté de la presse et qu’il vise à protéger la vie privée.
Nous tenons à exprimer notre profonde inquiétude quant aux implications de cette disposition de loi. Nous estimons qu’elle pourrait non seulement protéger des individus malveillants, mais également avoir des conséquences significatives sur les journalistes d’investigation, en particulier ceux travaillant sur des sujets sensibles très souvent liés à des questions de gouvernance (blanchiment d’argent, corruption, fraudes fiscales, comptes détenus dans des paradis fiscaux et mouvementés via des messages électroniques), ou à des questions d’atteinte à la sûreté d’État.
Nous estimons qu’elle pourrait non seulement protéger des individus malveillants, mais également avoir des conséquences significatives sur les journalistes d’investigation, en particulier ceux travaillant sur des sujets sensibles
En effet, cette disposition risque de limiter la liberté de la presse en dissuadant les journalistes de poursuivre certaines enquêtes ou de divulguer des informations importantes pour le public. De plus, elle pourrait compliquer la protection des sources, compromettre l’indépendance journalistique et accroître les risques juridiques lors de la collecte de preuves.
En conclusion, nous appelons au retrait pur et simple de cette disposition de loi, qui met en péril la loi n° 2013-546 du 30 juillet 2013 relative aux transactions électroniques.