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Côte d’Ivoire, le village Modeste (Grand-Bassam), deux frères se battent pour la chefferie

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Le village Modeste de Grand-Bassam en proie à un problème de chef

Depuis quelques mois, une crise secoue la chefferie du village de Modeste, un village situé sur l’axe Abidjan-Bassam. La gouvernance de Koney Ahoua Simon, nommé chef de Modeste, depuis 2000, est contestée par la population. 

En raison de cette situation, les villageois ont demandé et obtenu de la famille Koney un chef provisoire, en attendant la nomination d’un nouveau chef selon les us et coutumes du peuple N’Zima. Décryptage d’une situation rocambolesque. 

Ayant appris qu’il existe une crise au sein de la chefferie de Modeste, notre équipe de reportage s’est rendue sur les lieux, le samedi 12 décembre 2020. Arrivés à Koney-Souazo (lieu où se trouve la chefferie), nous sommes informés que le chef est absent et que c’est à Grand-Bassam que nous pourrons rencontrer le chef provisoire. 

Cap est mis sur Grand-Bassam. Après quelques minutes de route, nous voici au centre Abel. Après quelques instants d’attente, un jeune homme en tenue de tennis descend d’un véhicule de type 4×4. C’est lui Koney Niamkey Jonas, chef provisoire de Modeste.

Vice-président de la jeunesse communale de Grand-Bassam et responsable d’une Ong italienne qui travaille pour la promotion de la jeunesse. Il nous reçoit dans son bureau logé au sein dudit centre. 

Les origines de la crise 

  • Le chef provisoire a déploré le fait que son grand-frère ne dirige pas le village avec les autres chefs des communautés vivant sur le territoire de Modeste comme le faisait leur défunt père

Pour nous expliquer la crise que traverse la chefferie de Modeste, il a dû fait l’historique de ladite chefferie depuis la mort de son père jusqu’à son grand-frère Koney Ahoua Simon. Selon Koney Niamkey Jonas, après le décès de son père en 1999, pendant que la famille était à la recherche de son successeur, son grand-frère Koney Ahoua Simon,  » on ne sait part quelle manière  » a réussi à obtenir un arrêté préfectoral. Cela s’est fait au détriment de la famille et des villageois, fait remarquer le Benjamin des Koney. Malgré ce fait, « une partie de la famille a demandé de l’aider par opposition à d’autres. Quand il a pu bien s’installer, il a balayé tous ceux qui étaient autour de lui. »

Le chef provisoire a déploré le fait que son grand-frère ne dirige pas le village avec les autres chefs des communautés vivant sur le territoire de Modeste comme le faisait leur défunt père.’  » Lui sa chefferie n’était pas faite des chefs de Modeste  », a-t-il insisté en déplorant le fait que Koney Ahoua Simon s’est entouré des gens qui ne sont pas du village pour régner sur Modeste. En agissant ainsi, son grand-frère a brisé l’entente, l’union entre les membres de cette communauté mosaïque vivant à Modeste. 

II s’est mis à dos aussi la royauté de Moossou. Pourtant,  » lorsqu’il est venu, il a fait allégeance à la royauté de Moossou. Qu’est-ce qui s’est passé pour qu’il soit devenu l’ennemi de Moossou ? s’est interrogé Koney Niamkey  Jonas. Pour combattre Moossou et asseoir son pouvoir sur Modeste, il s’est servi des femmes.  » il faisait venir des femmes à Modeste et leur promettait des terres en échange de leur engagement à ses côtés, dévoile le chef provisoire. Mais de terre, ces femmes n’ont rien eu. 

Pis, c’est le chef lui-même et son groupe qui se sont transformés en véritables vendeurs de terrains. Le souci de ceux-ci, c’est la recherche de leur bonheur pendant que les populations qui sont déguerpies à longueur de journée sont dans la misère. 

Il y a des terres qui appartiennent au village, le chef au lieu de recaser ces villageois sur ces terres, il ne le fait pas. Au contraire, il cherche à les vendre aux acquéreurs les plus généreux. 

Aussi, les populations ne profitent-elles pas des retombées des logements sociaux. Tout cela est une affaire personnelle du chef, fait remarquer le vice-président de la jeunesse communale de Grand-Bassam. En plus de cela,  » en tant que responsable d’une Ong, j’initie parfois des projets pour participer au développement du village mais mes initiatives sont boycottées par mon frère », au grand dam des villageois. Qui sont terrorisés parfois par les éléments de la garde rapprochée du chef. Tous ces faits, explique-t-il, ont emmené les villageois à se révolter contre lui. Ils ont signé une pétition et se sont ensuite rendus massivement à la sous-préfecture de Grand-Bassam pour faire part au sous-préfet de leurs mésaventures avec leur chef.

Le choix du chef provisoire 

  • « pendant que la famille s’apprêtait à organiser la cérémonie d’installation du nouveau chef que Koney Ahoua Simon est venu des États-Unis. Il a contacté le corps préfectoral… »

Les villageois ne se sont pas arrêtés là. Ils ont à la suite de tous ces événements saisi la famille Koney de leur désigner un autre chef du village, vu que Koney Ahoua Simon, non seulement il ne s’occupe pas convenablement d’eux et il est toujours absent du village. En effet le chef depuis plusieurs mois s’est rendu aux États-Unis. Et avant de voyager il a nommé Ehui Aka qui n’est pas du village comme son intérimaire. 

Par rapport à la requête des villageois, la famille en attendant la nomination d’un nouveau chef, a proposé un chef provisoire en la personne de Koney Niamkey Jonas  » que je suis  ». Après ce choix, « pendant que la famille s’apprêtait à organiser la cérémonie d’installation du nouveau chef que Koney Ahoua Simon est venu des États-Unis. Il a contacté le corps préfectoral. Le préfet a demandé qu’on suspende la cérémonie d’installation d’un nouveau chef et qu’on privilégie la concertation. » 

Mais de concertation, il n’y a pas eu entre Koney Ahoua Simon et son frère, ni avec les villageois jusqu’à ce qu’il retourne encore aux États-Unis, laissant comme intérim Ehui Aka Désiré. Qui n’est pas du village. Ce dernier vient d’Azurretti, un autre village N’Zima situé aux encablures de Grand-Bassam. Ce énième fait a envenimé les relations entre la chefferie et la population. Ne pouvant pas supporter cela, le frère cadet Koney Jonas a saisi le tribunal de première instance de Grand-Bassam pour constater l’absence du chef de Modeste. 

Ainsi, le tribunal de première instance à la suite de son audition du 20 octobre 2020 a fait de Koney Niamkey Jonas chef provisoire de Modeste. Le 14 décembre, soit deux après avoir échangé avec Koney Jonas et dans un souci d’équilibre de l’information nous prenons rendez-vous avec un des collaborateurs du chef, du moins de l’ancien chef que nous connaissons bien. Mais quelle ne fut pas notre surprise, à notre arrivée chez ce notable qui a décidé de parler sous le couvert de l’anonymat. 

Cet ancien collaborateur du chef contesté a confirmé tous les propos de Koney Jonas. Il a dénoncé la gestion opaque de Koney Ahoua Simon sans manquer de faire remarquer que celui-ci n’aime pas être contredit. Selon lui, presque tous ceux qui étaient avec le chef l’ont quitté ou ont été remerciés. C’est ainsi qu’il a quitté le chef contesté. Il n’a pas manqué de souligner avec force que Koney Ahoua Simon est devenu un véritable vendeur de terrain. Quand il vient en Côte d’Ivoire, c’est pour vendre des terrains et repartir en Amérique, soutient-il. 

Les actions du camp adverse

Après avoir remporté son procès face à son frère, le chef provisoire s’est affronté à premier obstacle dans l’exercice de ses nouvelles fonctions. Il s’agit de l’arrêté du nouveau préfet de Grand-Bassam déclarant  » nulle et de nul effet ‘’ la décision de justice du 06 octobre 2020 faisant de Koney Jonas le chef provisoire de Modeste. 

C’est d’ailleurs sur cette décision du préfet que le chargé de communication du chef contesté s’est appuyé pour nous dire  » la décision de justice est nulle et de nul effet car selon le préfet, ce n’est pas la justice qui nomme les chefs de village. Cela relève de la compétence du préfet. Mais de sources judiciaires, l’on indique que l’arrêté préfectoral n’a aucune influence sur la décision de justice. Bien au contraire, cette ordonnance de justice prime sur l’arrêté préfectoral du 4 décembre relatif à la chefferie de Modeste. 

D’autres parts, Nahounou Paulin, le chargé de communication de Koney Ahoua Simon, a réfuté toutes les accusations portées contre ce chef. Selon lui, le chef provisoire raconte des allégations. « Personne n’est partie voir la famille Koney pour leur demander de nommer un chef. Ce n’est pas vrai », a-t-il dit dans la soirée de ce 16 décembre, lors d’un échange téléphonique. 

Avant d’ajouter qu’avant la crise du coronavirus, le chef s’était rendu aux États-Unis pour se soigner. Il y était quand les frontières ont été fermées en raison de la pandémie. Et profitant de cette absence prolongée du chef, son petit-frère Koney Jonas a commis un huissier pour constater l’absence du chef et par la suite l’a traduit en justice, souligne le chargé de Communication.

Le tribunal de Grand-Bassam lui a donné raison mais nous avons interjeté appel. Et le procès en appel aura lieu le 28 décembre 2020. En attendant que la justice se prononce à nouveau sur cette affaire, le chef provisoire s’attèle à recaser les personnes déguerpies, lors des différentes opérations immobilières. Il tente tant bien que mal à satisfaire les populations. 

Ahoussi Aka

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