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Cohabitation pacifique : Treichville, ces communautés étrangères de la Cedeao, symbole du vivre- ensemble

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Une des voies principales de Treichville, Rue 12/Ph Credo

Treichville, une commune du district d’Abidjan ou appelée communément N’Zassa est le symbole de tous les peuples de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) réunit sur son sol, avant et après l’indépendance de la Côte d’Ivoire, en 1960. On y trouve le Nigeria, Sénégal, Ghana, Mali, Guinée Conakry, Burkina Faso, Togo, Bénin etc. Des décennies après, ces peuples de la Cedeao, avec la cohabitation des peuples N’Zima de Kotoko de Treichville-Côte d’Ivoire n’ont jamais eu d’histoires ou de conflits communautaires. Une parfaite cohabitation pacifique que tous décrivent…

Mardi 19 octobre 2021. Treichville, une commune d’Abidjan où des peuples de la sous-région y sont et exercent en toute tranquillité leurs activités depuis des décennies. Le climat qui y règne à cette heure de la mi-journée est favorable. Les clients sont là en train de s’enquérir les prix des articles dans les magasins ou/et échangeant avec les commerçants. Toutes les rues sont bouillantes et assourdissantes. Acheteurs, commerçants, stylistes et autres à la recherche de leur pitance quotidienne ou articles qui pourront ramener chez eux. Quelques minutes, nous sommes conduits au domicile du chef de la communauté sénégalaise sis à la Rue 12 avenue barrée 14. Dans une concession, nous rencontrons des dames vêtues dans un pagne uniforme assises devant la cuisine. Des civilités s’en suivent. Des minutes après, nous sommes reçus par l’imam et chef de la communauté sénégalaise de Treichville, Mohamed Abibou Kane.

Sans autre forme de procédures, il affirme qu’ici à Treichville, les communautés de la Cedeao vivent en parfaite harmonie avec leur frères Ivoiriens. « Il n’y a pas de problèmes entre nous. D’ailleurs, en tant qu’imam principal de la mosquée sénégalise à Treichville, toutes les communautés de la Cedeao viennent prier, y compris nos frères et sœurs Ivoiriens. Il n’y a pas de conflits ou palabres avec nos frères Ivoiriens. Nous sommes ensemble », affirme l’imam Mohamed Abibou Kane. Arrivé en décembre 1976 en Côte d’Ivoire, il effectue des voyages d’affaires qui le conduit dans des pays comme le Sénégal et le Gabon. Décembre 1993, il décide de regagner la Côte d’Ivoire pour y rester définitivement. Ayant connu et côtoyé ses concitoyens sénégalais, il raconte ce qui les tient à cœur en séjournant dans ce pays frère. « Les Sénégalais qui sont en Côte d’Ivoire sont dans l’activité commerciale. Ils y sont depuis des années. C’est dans ces activités qu’ils gagnent leur argent. Ils n’ont pas donc pas intérêt que la Côte d’Ivoire qui les accueille s’embrasse », souligne-t-il. Pour le chef de la communauté sénégalaise, son vœu, aujourd’hui, en ce XXIè siècle, la paix. « Nous voulons la paix de la sous-région et sans elle, il n’y aura pas de développement des nations africaines », souhaite de toute son énergie, Mohamed Kane.

A Treichville, il y a aussi une forte communauté guinéenne. Cette communauté exerce dans la vente d’articles hommes dans les magasins, tient des kiosques à café et fait d’autres petits métiers au marché de ladite commune. Cette communauté a décidé de confier la gestion de leurs affaires à la jeunesse. Cependant, les sages guinéens sont là, pour régler tout ce qui pourrait fragmenter le tissu social de ces jeunes, et au besoin voir le consulat en Côte d’Ivoire. Dans un magasin d’articles de vêtements sis à la rue 12, le bouillant soleil nous donne des chaleurs insupportables. C’est dans ce lieu qu’il nous reçoit pour des minutes d’échanges.

Diallo Amadou Benté est le président de la jeunesse guinéenne de Treichville. « La commune de Treichville est un lieu où toute la Cedeao est représentée. Je peux dire que tout se passe bien. Je suis en Côte d’Ivoire, cela fait aujourd’hui plus de 21 ans. A Treichville, on peut estimer à plus de 7000 résidents de la Guinée », déclare le président de la jeunesse guinéenne. La cohabitation avec les peuples ou communautés et les Ivoiriens date depuis des années à Treichville. « Nous vivons en symbiose avec les autres peuples de la sous-région. A Treichville, pour ceux qui connaissent Petit Paris, il y a toutes les communautés. Chaque jour, nous nous côtoyons. Les relations sont au beau fixe. Il n’y a jamais eu de problème. D’ailleurs, quand une communauté à des difficultés, les autres soutiennent moralement, financièrement et spirituellement un peu comme en africain ».

Au quartier Apolo de Treichville, nous nous entendons bien. On fait tout ensemble. Ici, personne ne dira que tel est N’Zima, Ghanéen, Sénégalais etc

Ces communautés étrangères de la sous-région vivent depuis des décennies avec leurs frères Ivoiriens sans histoires. Celles-ci sont presque dans les 48 quartiers de la commune N’Zassa. Leur cohabitation avec les Ivoiriens de Treichville se déroulent sans heurts depuis des années d’existence. « Depuis que nos parents vivaient avec les Sénégalais, Haousa, Maliens, Nigérians etc, il n’y a jamais eu de palabres avec nous, Ivoiriens. Nos parents ne sont plus, c’est nous les enfants qui sommes là, à Treichville. Nous suivons la voie que les anciens nous ont laissée. Au quartier Apolo de Treichville, nous nous entendons bien. On fait tout ensemble. Ici, personne ne dira que tel est N’Zima, Ghanéen, Sénégalais etc. La preuve, ma fille a été mariée à un musulman…Pourquoi je ne me suis pas opposé, parce que nous sommes des frères et nous nous entendons bien. Je témoigne en tant que chef, il n’y a pas une communauté étrangère qui est en conflit avec une autre communauté ou peuple à Treichville », explique Nanan N’Gossan Mian, chef de la communauté N’Zima Kotoko de Treichville.  

Tous unanimes…

Ouédraogo Salifou est vendeur de poulets au grand marché de Treichville. Il y vit depuis 2004. « Nous vivons en parfaite harmonie avec nos frères et sœurs de la sous-région y compris les Ivoiriens. Nous sympathisons entre nous, il n’y a jamais eu d’histoires entre nous », indique-t-il. Toutefois, il fait remarquer que les petits problèmes entre eux sont récurrents et minimes. Qui « ne peuvent pas fragiliser la cohabitation entre eux Burkinabè ou Maliens. » A la rue 12 de Treichville, assis dans son magasin de vêtements, apparemment il n’a pas l’air tranquille. Actuellement, il confectionne des cravates des écoles et universités. Lui, c’est Ba Mamadou Kumba de nationalité guinéenne, qui accepte de nous parler. « Je suis en Côte d’Ivoire depuis 1998 et je réside dans la commune de Treichville. Depuis que je suis dans cette commune, je n’ai jamais eu de problème avec un Ivoirien ou toute autre communauté de la Cedeao. Les Ivoiriens avec lesquels je suis, j’avoue que nos relations sont au beau fixe », relate Ba Mamadou Kumba. Plus loin, il affirme que « certains me considèrent comme un ivoirien à part entière, et veulent m’octroyer la nationalité ivoirienne. Pour le moment, je leur dis que je vais réfléchir d’abord. Je suis dans de bonnes mains avec eux à Treichville. »

Le quartier Apolo où vivent les Ivoiriens et une forte communauté ghanéenne, Nigériane, ils se considèrent comme étant de la même famille africaine. L’intimité de certains n’a plus de secret. Dit-on. Kobenan Koffi, résident dans ce quartier Apolo a beaucoup d’amis avec ces ressortissants de la sous-région. « Nous sommes tous des frères, en dépit de nos activités que nous avons. Dans ce quartier, la majorité sont les Ghanéens, Nigérians, Guinéens et Marocains », confie-t-il. Pour lui, il n’y a jamais eu de conflits entre eux. Nonobstant, les petites querelles qui surviennent ça et là entre eux.

Au grand marché de Treichville, non loin du commissariat, il y a un essaim de commerçants de chaussures. Là, se trouvent des Ghanéens vendant des chaussures. Ils sont dans une association et se connaissent parfaitement et obéissent aux règles établis entre eux. Samuel Sakyi fait partie des commerçants de chaussures. Il est de nationalité Ghanéenne. « Nous sommes les plus nombreux qui vendons des chaussures. Il y a deux ivoiriens, mais qui n’y restent pas dans ce métier parce que pas habitués à la témérité du boulot. Sinon, ça marche bien », dit-il, avec sourire. A propos de cohabitation avec les autres communautés. « Vous savez que les Ghanéens qui sont ici en Côte d’Ivoire et particulièrement à Treichville sont inoffensifs et pacifiques. Ils souhaitent la paix entre eux et avec les Ivoiriens, qu’ils considèrent comme leurs frères, depuis des années », précise le commerçant de chaussures.

 Des petits palabres…ça ne manque pas

Bien qu’étant ensemble, il arrive souvent que ces personnes de la sous-région rencontrent de petites difficultés dans leur cohabitation. Des sujets comme emprunts d’argent, le problème d’adultère, de places sur le site de commerce etc sont des problèmes récurrents. Pour Diallo Amadou, ce sont des petites choses qui surviennent entre nous Guinéens ou autre peuple. « Lorsque survient un problème entre nous Guinéens, on approche les sages, on soumet le problème et ils le règlent. Au finish, la personne en faute se soumet à la décision des sages », clarifie-t-il. Il y a quelques mois, le site de Petit Paris de Treichville, sur lequel sont les commerçants fait l’objet de litige. La propriétaire des lieux, selon les commerçants voudrait faire des rénovations. Les autorités de la commune ont intervenu pour régler ce différend. Pour nous, c’est un acte salutaire. Hormis cet incident malheureux avec la propriétaire du site, Diallo Amadou pense que les rapports avec les Ivoiriens sont au beau fixe.

Affaire Asec mimosas-Ashante Kotoko du Ghana

L’affaire Asec mimosas et Ashante Kotoko du Ghana, en novembre, 1993, fut un évènement terrible et effroyable pour les deux peuples, surtout celui de la Côte d’Ivoire. Barbarie, bastonnade, injures, morts…des superlatifs que les Ivoiriens n’ont pu supporter à la vue de leurs frères footballeurs et supporters ivoiriens résidents à Kumassi (Ghana) ensanglantés par les supporteurs de Ashante Kotoko du Ghana. Et ce, dans le cadre du match éliminatoire de la Coupe d’Afrique des nations des clubs champions. Ces événements restent encore gravés dans la mémoire des Ivoiriens qui sont à Treichville. Un fait que ne compte pas oublier de sitôt, même s’ils ont pardonné à leurs frères Ghanéens.

Toutefois, des Ivoiriens et Ghanéens racontent ce dépit de novembre 93. La Reine mère Emilienne Anotchi, porte-parole de Nanan du Ghana en Côte d’Ivoire, absent du pays pour des raisons de santé, a décrit les faits tragiques qui se sont passés, à Treichville. Une commune où réside la plupart des Ghanéens d’ailleurs. « Ça chauffé ce jour-là, à Treichville ! Ce problème ne sait pas arrêter seulement aux Ghanéens. Les Akan, Agni et Apolo qui disent qu’ils sont de la Côte d’Ivoire ont été battus. Il y avait des voyous qui ont infiltré la foule de ceux qui voulaient en découdre avec les Ghanéens vivant à Treichville. Moi-même, j’ai accompagné des gens à l’ambassade du Ghana. J’ai vu des blessés et autres couchés dans la cour de cette institution. Il y a aussi des morts. Des jours après, d’autres ont été envoyés au Ghana. Je peux dire que le quartier Apolo de Treichville a été secoué pas comme les autres quartiers d’Abidjan », témoigne la Reine mère Anotchy.

« Je suis d’origine ghanéenne, alors pourquoi se battre ? Au contraire, quand il y a eu ces faits, j’ai caché beaucoup dans mon salon. Ils ont été protégés pour éviter le pire. Dieu merci, cela s’est passé un jour voire deux jours, après l’accalmie est revenue », se souvient Nanan N’Gossan Mian.

A Treichville, une cour appartenant au chef de la communauté des N’Zima Kotoko de Treichville, Nanan N’Gossan Mian Georges, raconte qu’il avait fait louer des appartements à des femmes ghanéennes. Cet événement Asec-Kotoko du Ghana fut dramatique pour les habitants de Treichville. « Je suis d’origine ghanéenne, alors pourquoi se battre ? Au contraire, quand il y a eu ces faits, j’ai caché beaucoup dans mon salon. Ils ont été protégés pour éviter le pire. Dieu merci, cela s’est passé un jour voire deux jours, après l’accalmie est revenue », se souvient Nanan N’Gossan Mian.

Chef N’Zima Kotoko de Treichville, Nanan N’Gossan Mian

Des mariages entre peuples

Cette diversité culturelle des peuples de la sous-région est une énorme richesse pour la commune de Treichville. Malgré leur cohabitation, ils ont aujourd’hui des liens d’amitié et sentimentaux très développés entre eux. Ces communautés qui vivent depuis des décennies dans ces quartiers ont désormais plus de liens forts. Des Ivoirien(nes) à des Nigérians, Ghanéens, Guinéens… se marient entre eux. Avec l’autorisation des deux familles. Ces couples vivent ensemble, parfaitement, et partagent aujourd’hui leur amour, leur existence dans ces quartiers qui les a vus naitre ou dans lesquels ils sont venus y habiter. Des progénitures naissent de ces couples et grandissent pour témoigner à la face du monde cet amour sentimental qu’ils ont eu depuis leur conception originelle.

« Il y a beaucoup d’étrangers qui se sont mariés aux ivoiriennes. Comme, je suis d’origine ghanéenne, je peux témoigner que ce peuple a marié des Ivoiriennes et vice-versa. C’est mon cas. Ma mère est ghanéenne et est mariée à mon père, qui est ivoirien. Ces cas sont légion. Il y a certains qui disposent de concessions à Treichville », confirme la Reine mère de la communauté ghanéenne. Cette richesse culturelle et d’intégration entre les peuples s’agrandit de plus en plus depuis des années. Cette intégration sous régionale a pris un autre volet important des relations entre les deux pays ou plusieurs pays de la Cedeao. Des chefs Guinéens, Sénégalais et Ivoiriens ont témoigné avec amour et passion comment ces deux peuples se rencontrent, consolident et fondent leur amour sentimental. Les témoignages de ces personnes viennent corroborer l’existence de cet amour entre les couples de ces communautés étrangères est une réalité vivante, fortifiante que nul ne doit occulter à Treichville. Aujourd’hui, à Treichville, toutes les personnes interrogées ou de ressources sont d’avis que la cohabitation pacifique est une réalité existentielle et cimente les valeurs d’intégration que prône les pays de la Cedeao : la paix, l’unité, la solidarité et l’entente. A ce niveau, la commune N’Zassa est et demeure un modèle d’intégration sous-régionale en Afrique !

Magloire Madjessou

Encadré

Facebook : une communauté de partage et de solidarité

Treichville ou la commune N’Zassa. Cette commune cosmopolite est une grande richesse pour la Côte d’Ivoire depuis l’indépendance du pays. Ces communautés étrangères venues de leur pays d’origine à la recherche du bien-être sont épanouies et vivent paisiblement leur vie. Depuis presque deux ans, il existe dans cette commune N’Zassa, une plateforme du réseau social Facebook. Où enfants, adultes et vieillards y sont. Même les communautés étrangères y sont. Ils parlent entre eux des activités de la commune et résorbent au besoin des problèmes qui leur sont communs : cérémonies de baptême, mariage, deuil, même des projets de développements de la commune. Même en cas de problème d’une communauté, la plateforme sert de canal de communication pour toute la population. Tout y est sur cette plateforme social.

Quel exemple du slogan du vivre-ensemble, de développement et de solidarité ! Une plateforme sur laquelle, le maire de la commune François Albert Amicha intervient et propose des activités qui concernent toute la commune, dans laquelle, tous ont leur part à jouer. Personne n’est oubliée. L’avis de chacun est compté et pris en compte. Tous participent et viennent donner leur opinion sur un tel événement ou projet. Ça contribue à la richesse et au développement harmonieux de la commune.

M.Madjessou

 

Aly Tiero à Treichville : « Certes, il y a eu des velléités beaucoup plus à des moments donnés »

Aly Tiero, Directeur du SSCPH de la mairie de Treichville

Aly Tiero, Directeur des services sociaux, culturels et de la promotion humaine à la mairie de Treichville, se prononce sur la situation du peuplement des communautés étrangères de la Cedeao, dans la commune de Treichville. Il explique par des faits historiques, leur arrivée par vague successive en Côte d’Ivoire, précisément à Treichville et Plateau. Interview.

La commune de Treichville, depuis des années, fait face à un peuplement de communautés étrangères de la sous-région. Comment expliquez-vous cette problématique du flux migratoire dans cette commune ?

Parler aujourd’hui de la cohabitation entre les différentes communautés étrangères nous amène à faire une incursion dans l’histoire même de la Côte d’Ivoire. Parce que le peuplement de la Côte d’Ivoire s’est passé par vague successive mais il faudrait rappeler aux uns et autres que pendant la période coloniale, avant l’indépendance de la Côte d’Ivoire, il y a eu un certain nombre d’évènements. Ciceron nous disait que c’est l’institutrice de la vie. La Côte d’Ivoire fut une colonie à partir de 1893. Déjà, à partir de 1932, Houphouët Boigny avait commencé à dénoncer un certain nombre de choses à travers son pamphlet intitulé : « On nous a trop volés ». Son activisme a amené plus tard certains de ces aînés à constituer ce qu’on a appelé le Syndicat agricole africain, à partir de 1944. Qui donnera naissance à partir d’avril 1946, le Parti démocratique de Côte d’Ivoire, qui fut le premier parti politique. On note parmi ses aînés : Gabriel Dadié, Georges Kassi, Kouamé Adingra, Marcel Laubouet…qui vont créer le syndicat agricole africain.

Pour vous dire que la commune de Treichville n’est pas hasardeuse encore moins fortuite, déjà cette commune a pris une place prépondérante dans la lutte émancipatrice du syndicat agricole qui est créé à Treichville. Le Pdci-Rda qui était le porte flambeau de la lutte émancipatrice est créé à l’Etoile du sud de Treichville. Le syndicat agricole africain a été crée dans la cour de Godins à quelques à encablures du pont Houphouët Boigny. Donc une commune comme Treichville qui prend une part prépondérante dans la lutte émancipatrice.

A cette période, la moitié du Burkina, à partir de Bobodioulasso en descendant en Côte d’Ivoire, tout cela faisait partir du territoire ivoirien.

A cette période, Treichville va commencer à accueillir des communautés étrangères parce que Treichville, par définition, est une commune historique. Toute à heure, j’ai parlé de la lutte émancipatrice parce que cela aura un effet sur le brassage que nous avons à Treichville puisqu’elle joue un rôle historique. A cette période, la moitié du Burkina, à partir de Bobodioulasso en descendant en Côte d’Ivoire, tout cela faisait partir du territoire ivoirien. Ce qui explique un peu le flux migratoire des différentes populations mais lorsque les populations d’ailleurs venaient en Côte d’Ivoire, notamment à Abidjan, la plupart venaient à Treichville.

Les communes qui existent actuellement n’étaient pas encore sous cette forme. Vous aviez Plateau et Treichville, qui étaient les communes phares à l’époque. Or, la commune du Plateau était habitée par une certaine intelligentsia et beaucoup plus les Européens. A un moment donné, ils ont trouvé nécessaire d’aérer leurs espaces, de créer une autre zone de peuplement de l’intelligentsia africaine, l’élite africaine et un nombre de travailleurs puissent se retrouver à Treichville. Du coup, Treichville va connaitre ce peuplement mais avec une sorte de diversité. Au début de l’indépendance, beaucoup de pays limitrophes vont connaitre des bouleversements politiques, des coup d’Etat.

La Côte d’Ivoire apparait comme un pays stable de 1960 à 1970. Vous savez que lorsqu’il y a des coup d’Etat dans un pays, les populations cherchent à fuir leur pays à cause des coups de canons etc. Le Ghana, le Liberia, au Mali, au Burkina Faso, au Niger…vont connaitre des coup d’Etat dans ces pays. A part la Guinée et le Sénégal qui ne connaitront pas de coup d’Etat. Donc, il y aura un flux. En dehors de la stabilité de la Côte d’Ivoire, certaines populations vont venir en Côte d’Ivoire. Lorsqu’elles arrivent en Côte d’Ivoire, le lieu où beaucoup vont s’installer est la commune de Treichville, qui occupe 70% de l’activité du Port autonome d’Abidjan. Donc, il y a un besoin de mains d’œuvres.

Ces communautés étrangères venues de la sous-région, qui sont, aujourd’hui, dans la commune de Treichville. Est-ce qu’il n’y a jamais eu de conflits intercommunautaires entre elles ou Ivoiriens ?

Certes, il y a eu des velléités beaucoup plus à des moments donnés

Certes, il y a eu des velléités beaucoup plus à des moments donnés. Saviez-vous que jeune, au cours d’un match de football, on entend que dans tel pays on a tué des Ivoiriens, cela amène des petites crises mais au niveau de la commune de Treichville, très souvent ça ne va pas loin. Il y a eu des velléités entre ivoiriens et sénégalais quelquefois ou ivoiriens et Ghanéens. Je ne peux pas cacher cette réalité. Vous vous rappelez quand il y a eu le problème Asec mimosas et Ashante Kotoko du Ghana…Quelquefois, on attend des bruits entre un pays de la sous-région, il y a des velléités, mais des conflits où il y a des morts d’hommes entre communautés, je n’ai pas souvenance de cette situation.

Des années après, votre commune N’Zassa reste un modèle d’intégration et de cohabitation pacifique pour la sous-région et particulièrement la Côte d’Ivoire. Selon vous, qu’est ce qui pourrait expliquer ce fait ?

Je suis fier de voir que ma commune natale et celle dans laquelle je travaille est un exemple d’intégration. Je vous ai dit que la commune est l’archétype de la vision houphouëtienne de l’intégration des peuples et la diversité culturelle. C’est avec beaucoup de fierté que je le dis qu’on veuille ou pas. Aujourd’hui, aucun peuple ne peut vivre en autarcie. Nos gouvernants, notamment Félix Houphouët Boigny l’ont compris vite, je suis fier. Chaque fois que je pars en mission, je sors de la Côte d’Ivoire, quand j’explique aux uns et autres le brassage que nous avions dans la commune de Treichville, le vivre-ensemble qui est de mise dans la commune, ils n’en reviennent pas. Les informations qu’ils avaient de la Côte d’Ivoire, en son temps, ce n’était pas possible de voir des peuples vivre ensemble dans la tranquillité, le bon voisinage en Côte d’Ivoire encore moins dans la commune de Treichville. Je le disais et je leur demandais de vérifier cette information, et ils me revenaient que nous avons appris que la commune est un exemple, où les peuples vivre ensemble.

Est-ce que la mairie de Treichville organise des activités qui réunit les communautés étrangères de la sous-région ?

Nous avons une organisation interne qui fait que nos frères et sœurs de la sous-région sont impliqués dans nos activités. La commune de Treichville est subdivisée en 48 quartiers. A la tête de chaque quartier, vous avez ce qu’on appelle les Comités de gestion de quartiers. Vous avez l’implication des communautés étrangères depuis la base. Les Comités de gestion n’excluent pas la présence des communautés qui sont dans les quartiers. Or, nous passons par les Comités pour véhiculer les informations pour impliquer les populations aux actions municipales. C’est pourquoi, je vous disais que si vous ne demandez pas les pièces d’identité dans la commune, il vous sera difficile, de dissocier le Treichvillois ivoirien et le Treichvillois non ivoirien.

Peut-on avoir un nombre approximatif des communautés étrangères qui vivent à Treichville ?

La moitié de la population de Treichville est ivoirienne. Et cette moitié est non ivoirienne. La population étrangère on peut l’estimer à plus de 50 000 habitants. La commune de Treichville, selon le Recensement général de l’habitat et de la population de 2014, nous sommes à 102 534 habitants que compte Treichville.

Pouvez-vous dire, si les communautés étrangères participent-elles aux valeurs que sont l’entente, la solidarité, l’union entre elles à Treichville ?

Oui, un grand nombre. Je ne ferai pas de langue de bois. Vous aviez des communautés, qui traditionnellement sont renfermées sur elles, qui généralement sont très peu encrées non parce qu’elles regardent les autres en chien de faïence, non. En termes de participation aux activités, c’est le comportement par lequel on les identifie. Je ne vous dirai pas que la communauté mauritanienne participe aux activités à Treichville, non. La grande majorité des communautés participent aux projets de la commune autour de 75%.

Lors de nos échanges avec les populations de Treichville, nous avons appris la mise en place d’une plateforme au niveau de la commune. Vous confirmez cette information ?

Oui. Il y a une plateforme qui existe. Je ne dirai pas que tout le monde est sur la plateforme. Mais elle n’exclue personne. Vous avez un certain nombre de jeunes de Treichville qui y sont, et deviennent de plus en plus nombreux. Le nombre d’adhérents à cette plateforme croit de jour en jour. C’est l’une des plateformes qu’on utilise. Elle n’est pas exclusive. Vous avez la plateforme des enfants de Treichville, les Grins de Treichville etc. On n’a jamais mené une action en disant qu’elle concerne uniquement que les Ivoiriens.

Un mot sur la cohabitation pacifique…

C’est en Côte d’Ivoire nous pouvons voir cette situation de joie. C’est-à-dire les populations de pays frères sortent, jubilent et il n’y a rien.

Pour le moment en Côte d’Ivoire, à part quelques moments de crises discontinuent. Quand il y a eu des élections de 2020, et les partis d’opposition ont lancé la désobéissance civile quelquefois sans raisons valables, les gens s’attaquaient aux biens et autres. Je pense qu’on peut être fier des dirigeants de nos pays. Dans l’ensemble, il y a une coexistence pacifique en Côte d’Ivoire par rapport à ce que nous voyons ailleurs. Lorsqu’il y a des matchs de football, et une équipe de la sous-région marque un but, les gens jubilent. C’est en Côte d’Ivoire nous pouvons voir cette situation de joie. C’est-à-dire les populations de pays frères sortent, jubilent et il n’y a rien. Je ne veux pas citer de pays, mais il y a des pays que j’ai visité, vous êtes obligé de crier dans votre cœur. Vous allez crier, dès que ça sort, vous avez des problèmes. C’est un exemple parmi tant d’autres. Relativement parlant, je suis content. Pour le moment, ce que nous vivons en ce moment, c’est le moindre mal. Je souhaite vivement que la Côte d’Ivoire soit un peu à l’image de la cité historique et cosmopolite de la commune de Treichville.

Réalisée par M. Madjessou

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