Dans ce reportage, nous aborderons les défis du Régime social des travailleurs indépendants (Rsti) en Côte d’Ivoire. Malgré ses avantages promoteurs pour commerçants et transporteurs, des obstacles financiers freinent son succès. Témoignages et analyses.
Depuis environ quatre ans, le Régime social des travailleurs indépendants (Rsti), initié par le gouvernement ivoirien et administré par la Caisse nationale de prévoyance sociale (Cnps), enregistre plus de 720 000 adhérents. Ce dispositif vise à offrir aux travailleurs indépendants une retraite paisible permettant des cotisations mensuelles modiques. Cependant, sa mise en œuvre rencontre de nombreux défis.
Les réalités des commerçants de Koumassi
Au Grand marché moderne de Koumassi, rouvert en 2024, les commerçants peinent à équilibrer leurs finances. Ce samedi 16 novembre 2024, sous un soleil de plomb, mais ils sont dans le marché moderne construit par l’actuel maire Cissé Bacongo. Entre loyers élevés, frais d’installation et remboursements d’emprunts, leurs marges bénéficiaires s’amenuisent.
Odette Sali Koko, commerçante de vivriers, témoigne : « Je n’ai pas encore pu cotiser…
Odette Sali Koko, commerçante de vivriers, témoigne : « Je n’ai pas encore pu cotiser, malgré mon inscription depuis plus d’un an. Les charges quotidiennes et le prix des étals rendent cela difficile. »
De son côté, Gossé Désiré Mohamed, secrétaire du marché, a suspendu ses cotisations après des débuts prometteurs, évoquant des conflits internes et des difficultés financières. Cependant, il garde espoir : « Dès que mes affaires iront mieux, je reprendrai, car c’est un projet bénéfique pour nous. »
Une initiative applaudie mais sous-financée
Au marché Poulets de Koumassi, les commerçants estiment les mérites du Rsti, mais regrettent de ne pas pouvoir honorer leurs engagements. Barakissa Koné, présidente des femmes du marché, insiste sur l’importance de ce régime : « Nous devons cotiser pour garantir une retraite digne après nos années d’activité. »
Malgré les intentions affichées, le manque de liquidités freine de nombreux adhérents, qu’ils soient commerçants ou transporteurs. Amidou Coulibaly, chauffeur à la gare de Koumassi, souligne : « C’est une bonne initiative, mais nos charges quotidiennes nous étouffent. »
Bien que prometteur, le succès du Rsti repose sur une sensibilisation accrue et un accompagnement financier des travailleurs indépendants. Sans mesures adaptées, ce régime risque de ne pas atteindre ses objectifs sociaux.
Encore de la sensibilisation pour le Rsti
Alima Sanogo et Barakissa Koné, ont exprimé les nombreuses difficultés auxquelles font face les commerçants au quotidien
À Koumassi, les présidentes des associations de commerçants, Alima Sanogo et Barakissa Koné, ont exprimé les nombreuses difficultés auxquelles font face les commerçants au quotidien. Elles soulignent la nécessité de poursuivre et d’intensifier les campagnes de sensibilisation pour encourager une adhésion massive au Régime social des travailleurs indépendants (Rsti).
« Beaucoup de femmes hésitent encore à cotiser, car elles ne savent pas où vont leurs contributions », déplorent-elles.
Au Grand marché de Koumassi, plusieurs commerçantes rencontrées ignorent encore l’existence de ce régime. Cependant, certaines, comme Edwige Dah, considèrent qu’il est urgent de s’inscrire. « La retraite arrivera tôt ou tard. Il est temps pour nous de penser à l’avenir et de commencer à cotiser », confie-t-elle, émue.
Une initiative porteuse d’espoir
Les agents de la Caisse nationale de prévoyance sociale de Côte d’Ivoire (Cnps) redoublent d’efforts pour sensibiliser les commerçants, artisans et entrepreneurs sur les avantages du Rsti. À travers des campagnes dans les communes d’Abidjan et dans l’intérieur du pays, ils s’efforcent de vulgariser ce régime.
À Koumassi, une cinquantaine de commerçants déclarent être inscrits, mais la majorité peine à régulariser leurs cotisations mensuelles en raison de difficultés économiques. Malgré tout, ils restent optimistes et envisagent de le faire dès que leurs activités connaîtront un regain. Pour eux, le Rsti représente un filet de sécurité pour une retraite paisible.
La CNPS rassure
David-Hervé Doumouya, directeur communication, marketing et relation clients à la Cnps, insiste sur l’importance du Rsti pour tous les travailleurs indépendants.
Une carrière plus longue garantit une pension encore meilleure
« Plus vous cotisez longtemps, plus votre pension est élevée, pouvant représenter entre 30 et 40 % de votre revenu moyen de référence. Une cotisation sur dix ans permet de toucher entre 40 000 et 50 000 Fcfa par mois. Une carrière plus longue garantit une pension encore meilleure », explique-t-il.
Concernant le bilan, Doumouya se réjouit : « En 2020, le régime comptait moins de 1 000 souscripteurs. Aujourd’hui, en 2024, nous avons dépassé les 720 000 adhérents, preuve de la viabilité et de la fiabilité du Rsti. »
Pour convaincre les sceptiques, les campagnes de sensibilisation doivent se poursuivre. Le Rsti incarne une véritable opportunité pour garantir une retraite digne à ceux qui, chaque jour, bâtissent leur avenir à travers leur travail acharné.
Magloire Madjessou
Encadré1
Les avantages du Rsti
L’instauration du Régime social des travailleurs indépendants (Rsti) par la Caisse nationale de prévoyance sociale (Cnps) offre un éventail de prestations adaptées aux travailleurs indépendants.
En fonction de leur cotisation sociale et de leurs revenus mensuels, ces derniers peuvent bénéficier de divers avantages, notamment des allocations liées aux accidents, à la maternité ou à la vieillesse.
David-Hervé Doumouya, directeur communication, marketing et relation clients à la Cnps, a souligné les bénéfices de ces prestations. « En cas de décès de l’assuré principal, le conjoint survivant bénéficie d’une pension de retraite à vie.
De plus, si des enfants mineurs sont à charge, ils continueront de percevoir cette pension jusqu’à leur majorité. Ma prière est que tous les travailleurs indépendants adhèrent à ce régime et cotisent durablement pour en récolter les fruits », a-t-il déclaré.
Encadré 2
Prestations spécifiques
Indemnités journalières en cas de maladie ou d’accident : cotisations aux travailleurs indépendants lorsqu’une incapacité de travail dépasse 14 jours. Ces indemnités équivalentes à 50 % du revenu déclaré, plafonnées à 90 000 F CFA par mois.
Indemnités journalières pour congé de maternité : octroyées aux femmes indépendantes pendant trois mois. Elles représentent 100 % du revenu déclaré, dans une limite de 180 000 F CFA par mois.
Pension de retraite : payable à vie au travailleur indépendant. Ce montant peut être doublé si ce dernier a également cotisé à la retraite complémentaire. En cas de décès, la pension est transférée, sous conditions, aux ayants droit.
Modalités de cotisation :
-La cotisation est libre, à condition de respecter un minimum fixé selon la catégorie socioprofessionnelle.
-Lorsque le montant de la cotisation dépasse 21 600 F CFA (correspondant à un revenu supérieur à 180 000 F CFA ), la différence est automatiquement affectée à la retraite complémentaire au taux de 9 %.
Encadré 3
Des opportunités à saisir
Quelles perspectives s’offrent aux travailleurs indépendants grâce à ce régime innovant ? La Cnps, à travers le Rsti, propose une solution inclusive prenant en compte toutes les tranches d’âge. Cependant, de nombreux commerçants, artisans, transporteurs et autres acteurs économiques restent mal informés ou hésitent encore.
La Cnps, à travers le Rsti, propose une solution inclusive prenant en compte toutes les tranches d’âge
Certains manifestent un intérêt réel à souscrire rapidement, par crainte que cette opportunité ne disparaisse. Toutefois, la Cnps doit intensifier ses campagnes d’information pour dissiper les doutes et les suspicions qui freinent encore l’adhésion.
Ce vaste projet ambitionne d’offrir une retraite paisible et épanouie à ceux qui, aujourd’hui, se battent pour construire leur avenir. Comme le dit l’adage : « La retraite se prépare, aujourd’hui, par un travail assidu et une planification active.
M. Madjessou
« 2020 a été proclamée l’année de «Faire taire les armes sur le Continent». Comment réussir cette prouesse dans un continent aux prises avec des phénomènes prégnants tels que le terrorisme, les conflits intercommunautaires, les crises pré et post électorales ou encore les différends entre Etats ? En agissant de manière concrète sur tous ces sujets et leurs causes profondes, en se donnant les moyens politiques, militaires et diplomatiques, le pari de faire taire les armes pourrait être gagné.»