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Infirmité motrice cérébrale (Imc) : Dans l’univers des enfants « rejetés » ou « sorciers »

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Des enfants atteints d'Imc du Centre Don Orione de Bonoua/Ph Credo

L’Infirmité motrice cérébrale (Imc) affecte les enfants de 0 à 15 ans présentant un retard de développement. Le Centre Don Orione de Bonoua accueille ces enfants, leur offrant rééducation et éducation. Depuis des années, le centre soutient ces enfants Imc venant de Bonoua et d’Abidjan. Immersion dans ce milieu, où ces enfants sont parfois rejetés et stigmatisés, en tant que sorciers. Reportage

L’infirmité motrice cérébrale peut être provoquée par divers facteurs tels que les effets secondaires des médicaments, des accidents pendant la grossesse ou l’accouchement, ou des complications après la naissance, comme le paludisme.

Dans une salle de rééducation déserte, des bancs sont soigneusement alignés dans la vaste pièce. À proximité, le bureau de Mélanie Ouan, vice-responsable du service de psychomotricité du Centre Don Orione, est calme. Elle nous informe que les résidents du centre sont déjà rentrés au Village d’hébergement ou certains sont retournés à Abidjan depuis 11h45, ce vendredi 15 septembre 2023.

Dans ce centre, des mères de famille sont assises, certaines s’occupant de banalités, d’autres gémissant désespérément pour le sort de leurs enfants. Leurs visages reflètent le découragement. Parmi elles, certaines sont accompagnées de leurs enfants atteints de troubles neuro-moteurs.

Il a abandonné l’enfant au prétexte que ce n’est pas un enfant normal

Ouattara Solange, surnommée « Maman tout va bien« , est venue avec sa petite-fille, Ami, âgée de 4 ans, l’enfant de son fils qu’il a abandonné en raison de son état de santé. « C’est l’enfant de mon fils. Il a abandonné l’enfant au prétexte que ce n’est pas un enfant normal. Elle est dans ma main depuis 3 ans », souligne Ouattara Solange.

Elle souffre d’un trouble psychomoteur cérébral qui l’empêche de marcher ou de s’arrêter. Ouattara Solange raconte l’accouchement difficile de sa belle-fille, son absence de pleurs à la naissance et les crises d’épilepsie qui ont suivi. C’est au Centre Don Orione de Bonoua qu’elle a trouvé l’espoir, où grâce aux soins appropriés, Ami peut aujourd’hui effectuer certains gestes malgré son incapacité à marcher.

Gody Marie Noëlle est la mère d’Emmanuel, un garçonnet de 4 ans souffrant de problèmes respiratoires. Après avoir suivi les conseils d’une sage-femme, elle a amené son fils à Don Orione. Aujourd’hui, Emmanuel peut marcher et réaliser d’incroyables acrobaties dans la cour du centre. Sa capacité à parler et à exprimer ses besoins remplit de bonheur Gody, une mère reconnaissante d’avoir choisi le Centre Don Orione pour son enfant.

La statue de Don Orione Bonoua

« Le petit a un problème de respiration. La sage-femme me conseillait de voir un thérapeute pour les soins de mon petit. Après, il est tombé malade. Dans une clinique, il y a une infirmière qui m’a conseillé de venir à Don Orione, qui a une des amies, qui a fait cette expérience merveilleuse, en envoyant son enfant à Don Orione », raconte la mère Gody Marie-Noëlle.

Malgré tout, des visages radieux….

Dans ce centre où résident la plupart des enfants, l’atmosphère est empreinte de joie. Les discussions informelles fusent, ponctuées parfois de taquineries et d’agitations. À dix minutes de marche, dans le village d’hébergement, adultes et enfants occupent leurs propres chambres. De vastes dortoirs servent de lieu de réinsertion tant pour les enfants que pour les adultes.

Dans ces dortoirs, chaque enfant vit aux côtés de sa mère qui veille sur lui. Ils partagent leur quotidien et échangent sur leurs centres d’intérêt avec bonheur et enthousiasme. Ils nous accueillent chaleureusement, rappelant leurs parcours inhabituels depuis leur arrivée au centre Don Orione.

Gaël, élève en CM2, est atteint d’une Infirmité motrice cérébrale (Imc) depuis quelques mois. Il est ici pour rééduquer ses membres inférieurs. « Maintenant, ça va un peu mieux. Du lundi au vendredi, je fais mes séances de rééducation ici », confie-t-il. Selon lui, ce centre est un endroit idéal pour les enfants souffrant de maux aux pieds et à la tête.

Marc, âgé de 16 ans, fréquente ce centre depuis sa petite enfance dans l’espoir de guérir. « Je vais à la piscine avec le maître-nageur. Je me porte mieux maintenant », témoigne-t-il. Malgré son handicap, il fréquente l’école, même si son niveau d’instruction diffère de celui des autres enfants. Il raconte son quotidien avec sérieux, entraînant ses difficultés à marcher et les progrès qu’il fait, même s’ils sont lents.

C’est par le jeu que l’enfant acquiert une certaine autonomie. Cependant, on ne peut pas guérir cela à 100 %

Un autre enfant fait des efforts pour rejoindre les discussions malgré sa difficulté à marcher. Mathieu, handicapé des pieds en raison de problèmes nerveux, témoigne : « Mes pieds me font mal. Les médecins du centre m’ont prescrit un appareil et des séances de rééducation. Aujourd’hui, ça va un peu mieux. Je vais à l’école au centre », affirme-t-il, avec détermination.

Le centre Don Orione de Bonoua/Ph Credo

Mélanie Ouan, vice-responsable du service de psychomotricité du centre Don Orione de Bonoua, explique les défis auxquels ces enfants font face. L’Infirmité motrice cérébrale (Imc), une maladie touchant les enfants de 0 à 15 ans, retarde leur développement. « C’est par le jeu que l’enfant acquiert une certaine autonomie. Cependant, on ne peut pas guérir cela à 100 %. Certains peuvent s’exprimer verbalement ou par des gestes, mais ils ne peuvent pas intégrer une école normale », explique-t-elle.

Dans ce centre, 45 enfants atteints d’Imc sont pris en charge. Certains vivent sur place, d’autres viennent de la métropole abidjanaise pour suivre des séances de rééducation. Mélanie Ouan se réjouit du progrès de la société qui a accepté ces enfants, brisant ainsi les préjugés du passé.

« Aujourd’hui, ces parents célèbrent les anniversaires de leurs enfants handicapés. Ils sont habillés et coiffés comme les autres enfants. Ils ont les mêmes droits que les autres, même s’ils sont nés avec un handicap », conclut-elle, rayonnante.

 Prise en charge des enfants IMC

Les enfants atteints d’Imc sont accueillis dans le centre dès leur arrivée. Ils suivent des séances de rééducation pendant 30 semaines (environ 1 mois et demi). Chaque séance coûte 3000 F CFA, totalisant 90 000 F CFA pour l’ensemble du traitement. Certains parents ne peuvent pas assumer ces coûts, ce qui conduit à l’abandon de l’enfant dans le centre.

Les parents doivent également payer l’hébergement, environ 45 000 F CFA par mois. Le centre dispose d’une école primaire, où les enfants reçoivent des cours. Les enseignants se concentrent sur des matières telles que le langage, le dessin et organisent des discussions sur la famille. Les cours sont divisés en 4 groupes, chaque groupe recevant 45 minutes de cours.

Pour les enfants abandonnés du centre, Père Sylvain Oké, Econome du centre, laisse entendre que le Seigneur n’abandonne pas ses enfants. Selon lui, le centre à une vocation caritative.

Le village d’hébergement du centre Don Orione Bonoua/Ph Credo

« On essaie de prendre en charge les enfants abandonnés par leurs parents. Certes, ils sont nombreux. Par ailleurs, pendant que nous les prenions en charge, nous recherchons des parents, qui peuvent s’occuper d’eux, afin d’avoir une famille. Mais nous pensons, par ailleurs, que s’ils sont abandonnés par leurs parents, il y a deux choses qui expliquent leur comportement : la situation d’handicap de l’enfant ou les moyens financiers y font défaut », dit-il.

 Besoin de soutien financier, la fuite des parents 

L’orthophonie est également utilisée pour les aider à améliorer leur parole

Le centre propose des séances de stimulation, principalement basées sur le jeu, pour aider les enfants à développer leurs compétences en communication. Loraine Lefebvre est orthophoniste dans ce centre, depuis 2 ans. Selon elle, ils ont besoin de la stimulation pour les aider à mieux parler. Tout ceci se fait par le jeu principalement. « On regarde un peu, s’il sait regarder, écouter, capable de regarder la même direction qu’un adulte etc. qui sont à la base de la communication à observer et développer pour les enfants qui ont des difficultés dans ce domaine », souligne-t-elle.

L’orthophonie est également utilisée pour les aider à améliorer leur parole. Les progrès sont lents mais présents, chaque enfant progressant à son propre rythme.

Le centre ne reçoit pas de subventions gouvernementales et dépend des dons d’entreprises et d’Organisations non gouvernementales (Ong) pour fonctionner. Les bénévoles travaillent ardemment pour aider ces enfants, mais le centre a besoin d’une assistance financière accumulée de la part de l’État pour faire face efficacement aux défis auxquels il est confronté.

  • Les enfants qui sont dans le reportage portent des noms d’emprunt.

 Magloire Madjessou

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