Accueil A la une Me Habiba Touré, cheffe de cabinet de Gbagbo : « Pour Gbagbo,...

Me Habiba Touré, cheffe de cabinet de Gbagbo : « Pour Gbagbo, il est important de préparer la relève »

PARTAGER
Me Habiba Touré parle de Gbagbo et son nouveau parti politique/Ph DR

« Mon ambition c’est de partir » déclarait solennellement Laurent Gbagbo à ses partisans lors du congrès qui a vu la naissance de son parti, le PPA-CI. Dans le même temps l’ancien président ivoirien assurait qu’il ferait de la politique jusqu’à sa mort. Il a d’ailleurs été élu par acclamation ce week-end président de ce Parti des Peuples Africains – Côte d’Ivoire. Un parti qu’il veut socialiste, souverainiste, mais aussi et surtout panafricaniste. Pour décrypter ce discours très attendu, invitée de RFI ce matin, Me Habiba Touré, cheffe de cabinet de Laurent Gbagbo.

Lorsque Laurent Gbagbo dit « Je ferai de la politique jusqu’à ma mort », mais qu’un peu plus tard il déclare : « Mon ambition c’est de partir », que faut-il comprendre exactement ?

Habiba Touré Il faut comprendre qu’il n’entendait pas céder aux injonctions présentées parfois sous forme de conseils des uns et des autres, lui demandant de se retirer de la vie politique et même au chantage qui a été fait, notamment à l’occasion de son retour. Donc c’était un message très fort qu’il entendait formuler. C’est que c’est un homme politique, c’est un homme qui a toujours fait de la politique et il entend en faire jusqu’à sa mort. C’est ce qu’il a toujours indiqué.

Maintenant, quand il dit -il parlait, entendons-nous bien, dans le cadre du parti- que son ambition est de partir, c’est-à-dire que, pour lui, il était important aussi de préparer la relève, de préparer de nouvelles générations et de les voir fonctionner aussi au sein de l’appareil du parti. Donc il s’agit, non pas d’abandonner qui que ce soit et en premier lieu ses militants, mais de préparer dès maintenant la relève des nouvelles générations à l’exercice du pouvoir au sein, déjà, de l’appareil et pour la suite, bien évidemment.

Est-ce que cela veut dire qu’il prépare une autre personnalité pour se présenter au nom du parti en 2025 ?

Ce n’est pas ce qu’il a indiqué. Ce qu’il a indiqué, c’est qu’il était important, au sein du parti, de préparer tous ces jeunes cadres du parti à l’exercice du pouvoir au sein de l’appareil du parti et aussi de raviver, de dynamiser le parti. C’était cela son ambition. Il ne s’agissait pas de 2025, 2025 est encore loin.

Donc Laurent Gbagbo n’exclut pas de se présenter à la présidentielle de 2025 ?

Quand vous écoutez son discours, 2025 n’était pas abordé, ni dans un sens ni dans l’autre. Je vois bien que vous essayez d’interpréter, mais il n’y a pas de message subliminal dans son discours. C’était dans le cadre du congrès constitutif, il s’agissait de s’adresser aux militants et de s’adresser à tous ses militants et à tous ses sympathisants.

Lire aussi: Gbagbo depuis Mama : « Nous voulons la fin de ce cycle de morts politiques »

Lors du discours de Laurent Gbagbo de dimanche, il a été longuement question aussi du panafricanisme, qui est en quelque sorte l’un des trois piliers idéologiques sur lesquels repose avec le PPA-CI, avec le socialisme et le souverainisme. Mais de quel panafricanisme Laurent Gbagbo parlait-il ? Est-ce qu’il souhaite relancer le vieux projet d’États-Unis d’Afrique ?

Je pense qu’il a été très clair. Nos États africains sont de tous petits États qui ne permettent pas, finalement, de constituer un réel pouvoir africain dans l’intérêt des peuples africains. Et c’est l’ambition du PPA-CI finalement. C’est-à-dire, d’essayer de créer des liens politiques, une unité politique, une union politique, l’union des peuples africains aussi, afin que leur voix puisse peser demain.

Donc c’est de ce panafricanisme-là qu’il parlait. C’est à dire, globalement, que tous les États africains puissent s’unir. Comme ce que l’on a pu voir, il a donné l’exemple des États-Unis, mais il y a également donné l’exemple de l’Union européenne -de l’Europe- qui constitue une force qui permet finalement de défendre les intérêts européens, face aux autres puissances. C’est la même chose qu’il veut pour les Africains.

Lors du congrès, en plus de la présence de partis amis ou alliés, on a noté la présence très remarquée du RHDP en la personne de son directeur exécutif Adama Bictogo. Quel était le message ?

Il s’agissait, pour le président Laurent Gbagbo, de montrer que faire de la politique ce n’est pas faire la guerre. Et quand on fait de la politique, nous ne sommes pas des ennemis. On peut avoir des divergences, on peut être de bords radicalement opposés, mais on doit pouvoir parler. On doit pouvoir s’asseoir et discuter. L’invitation du RHDP s’inscrivait dans la lignée de ce qui a toujours été le président Laurent Gbagbo : s’asseoir et discuter avec tous, sans exclusion. C’est pour cela qu’il avait demandé à ce que le RHDP puisse être présent à cette cérémonie.

Lire aussi: Gbagbo à Ouattara : « J’étais leur chef de file, moi-même étant au dehors, il faut libérer les prisonniers politiques »

Vous avez expliqué tout à l’heure que Laurent Gbagbo souhaitait préparer une nouvelle génération pour lui succéder. Néanmoins, il a balayé d’un revers de la main le débat sur la limite d’âge, en disant : « Il y a des gens plus âgés que moi qui font de la politique ». Est-ce qu’il n’y a pas une contradiction ?

Il n’y a aucune contradiction. Ce qui choquait le président Laurent Gbagbo c’est que l’on puisse considérer qu’à un certain âge on doit arrêter de faire de la politique. Parce que cela, finalement, ce n’est pas un argument. La politique n’est pas une question d’âge, c’est une question de conviction, c’est une question aussi de proposition politique que vous pouvez faire au peuple, mais ce n’est certainement pas une question d’âge. Il a donné lui-même un certain nombre d’exemples. N’oubliez pas que Nelson Mandela, quand il a pris le pouvoir il avait 76 ans. En France, Clémenceau a permis à la France de gagner la Première Guerre mondiale en 1918. Il avait quel âge ? Pratiquement 77 ans. Donc ce n’est pas une question d’âge. Ce qu’il dit, c’est une question d’état d’esprit et de respect des textes.

Quel que soit l’âge que l’on peut avoir, si on ne respecte pas les textes, on sera confronté aux mêmes problèmes. Et quel que soit l’âge que l’on va avoir, qu’on ait 30 ans, 70 ou 80 ans, si l’on respecte les textes, vous allez voir que les guerres, tous les conflits qu’il a pu y avoir dans les pays africains vont disparaître. On aura d’autres problèmes que l’on reconnaît dans un certain nombre de pays et d’autres États démocratiques, mais en tout cas, tous les conflits qui amènent le peuple à sortir n’existeront plus. L’important c’est le respect des textes, quel que soit l’âge.

Source : Rfi

PARTAGER