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Côte d’Ivoire, les faux frais de transport de bétail ont-ils été supprimés ?

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Les moutons de l'abattoir de Port Bouet/Ph Credochristi

A quelques jours de la commémoration de la Tabaski, le gouvernement ivoirien a décidé de prendre des mesures pour lutter contre la vie chère, en supprimant les faux frais de transport du bétail. Qui ont des répercussions depuis 1986 sur les coûts du bétail et des acheteurs.

En prélude à la fête de la Tabaski du 21 août, et dans le cadre de la lutte conte la vie chère, le gouvernement ivoirien a pris des mesures visant à la suppression des faux frais de transport, sur l’acheminement des ovins, caprins et bovins.

Les faux frais de transport sont constitués, entre autres, du coût de transport, les tracasseries routières et perceptions illicites opérées par certaines organisations professionnelles, l’implication des intermédiaires véreux ou tutorat et la pratique du convoyage du bétail.

Moussa Zakou, président de la filière bétail et viande du Niger en Côte d’Ivoire, explique les retombées de cette mesure. « Nous n’avons pas encore eu de problèmes depuis que l’Etat de Côte d’Ivoire a décidé de la suppression des faux frais de transport des bétails », affirme-t-il. Toutefois, il reconnait que pour l’acheminement des bêtes à l’intérieur des frontières du Niger et Burkina faso, ils sont l’objet de tracasseries routières. « Lorsque nous quittons ces frontières voisines pour entrer sur le territoire ivoirien, nous ne sommes pas inquiets parce que la mesure du gouvernement ivoirien est respectée », confirme le président de la filière bétail et viande du Niger en Côte d’Ivoire.

Quant à N’Go Koffi, président de l’Association des bouchers ivoiriens (ABI), il indique qu’à l’époque, il y avait près de 25 check-point des frontières du Burkina Faso en Côte d’Ivoire. « Nous avons dénoncé ces problèmes minant la profession au cours d’un atelier à Grand Bassam, sud d’Abidjan. Aujourd’hui, il n’y a plus de check-point mais la viande est toujours chère », a-t-il souligné. « Les tracasseries routières continuent quand bien même notre filière souffre d’un manque d’organisation. La douane, la police et la gendarmerie interviennent sur ce volet du racket et cela impacte sur le prix de la viande », fait remarquer N’Go Koffi.

La mesure reste encore « amputée »

 Des acteurs des filières bétail et viande en Côte d’Ivoire sont confrontés au problème de préfinancement des cars de transports, explique Amidou Landouré, Secrétaire général des marchands et courtiers de Côte d’Ivoire, lors du convoyage depuis les frontières du Niger et Burkina Faso. Ces frais payés peuvent valoir 50.000 FCfa. « Le problème ne se pose plus à ce niveau maintenant. Par le passé, pour les faux frais, les opérateurs économiques déboursaient 400. 000 FCfa voire 500000Fcfa. Cela ne les empêchaient pas de vendre leur bétail », a-t-il précisé.

D’autres taxes sont par ailleurs imposées par l’Etat, à savoir le contrôle sanitaire des bêtes (125 FCfa, ovins et 250 FCfa, bovins), le package estimé à 1250 FCfa à Abidjan. Une fois le bétail atterrit à Abidjan,  les mairies et district d’Abidjan encaissent des taxes à hauteur de 100 FCfa sur chaque animal. « Ces taxes sont tout de même réglementaire du moment où c’est l’Etat qui a pris l’initiative de prélever sur les animaux importés ; personne ne peut donc venir s’interférer dans ces questions au prétexte que ce sont des faux frais », a commenté Amidou Landouré,

 Malgré la suppression, des coûts exorbitants sur les marchés

 Le 18 août, le ministère des Ressources halieutique annonçait l’arrivée provisoire de 70.000 bêtes pour la Tabaski. Depuis quelques semaines, plus de 500 bœufs et 2.000 moutons en provenance du Niger ont été convoyés en Côte d’Ivoire, nous a confié le président de la filière bétail et viande du Niger en Côte d’Ivoire. Ces animaux malgré la mesure de suspension de faux frais sur le transport sont élevés sur les marchés de l’Abattoir de Port-Bouët et d’Abobo, des communes d’Abidjan.

Selon Moussa Zakou, les prix des moutons sont à la portée de toutes les bourses. « Ces prix de moutons varient entre 60, 80, 100 à 300.000 FCfa. Par contre, il y a des bœufs qui coûtent de 200.000 FCfa à 7.000. 000 FCfa  ». N’Go Koffi, président de l’Association des bouchers ivoiriens, explique les raisons de la hausse des prix sur le marché. « Sur le marché du bétail, il y a des individus qui disposent des enclos et en vendent à des prix exorbitants. Cette manière de procéder fait qu’il y a des faux frais du transport », avise-t-il.

Ibrahim Konaté a acheté, à l’abattoir de Port-Bouët, trois moutons pour la fête de la Tabaski comme le recommande la tradition, pour celui qui en a les moyens. « Les moutons restent encore chers sur le marché. Les trois moutons m’ont coûté la somme de 260.000 FCfa », déclare-t-il. S’offusquant sur le principe de confiance que « l’Etat a rassuré ses concitoyens que les prix sont abordables à cette année. Ils tiennent des discours utopiques dans les médias alors que sur le terrain, la réalité est toute autre », a déploré Konaté.

Le tutorat, une autre gangrène en expansion

A propos des prix jugés élevés par les acheteurs, Aimé Koizan, directeur général du commerce intérieur, se défend: « Nous, notre travail est de permettre à ce qu’il n’y ai plus de faux frais de transport  de manière illicite sur le terrain. En outre, nous faisons en sorte qu’il y ait un très bon approvisionnement du marché. Cela va rassurer les opérateurs économiques qui viennent vendre sur notre territoire national ». Puis, il ajoute, « cela permet aussi de mettre le mécanisme de l’offre et de la demande ».

Certains opérateurs économiques et acteurs du bétail et viande sollicitent les services des producteurs de bétail des pays de l’hinterland pour les vendre ou revendre sur le marché, moyennant des pourcentages. Ce mécanisme, très en vogue, est appelé tutorat, qui a aussi un très fort impact sur le prix final de la bête. « Cet aspect de tutorat a fait l’objet de nombreux ateliers entre le ministère et les acteurs de la filière. Je ne dirai pas davantage parce que nous travaillons à mettre en œuvre l’ensemble des mesures identifiées », a conclu le directeur général du commerce intérieur.

Pierre Grah-Awoyo

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